C’est le regard déterminé que ce magnifique bouquetin quitte sa falaise protectrice pour s’offrir un petit déjeuner sur les hauteurs du Creux-du-Van…
Autant le dire d’emblée, je ne vais plus à la rencontre des bouquetins du Creux-du-Van à la belle saison en raison de la (trop) grande densité d’humain qui les entourent. Est-ce encore vraiment de la photographie animalière d’aller immortaliser des bêtes aussi imprégnés par l’espèce humaine, entouré de dizaines de randonneurs qui tentent de leur tirer le portrait avec un Iphone? Je pense que non…
En revanche, je ne résiste pas à aller admirer les seigneurs des alpes en automne ou au printemps, quand il est possible de rester seul avec eux durant de longues heures. Ce cliché date de l’automne dernier. La période des amours approchant, les bouquetins mâles qui fuient le cirque du Creux-du-Van durant l’été rejoignent les étagnes pour passer l’hiver. Après avoir contemplé un superbe lever de soleil sur les alpes depuis le point de vue surplombant la Baronne, je me suis rendu au bord du Creux. C’est là que j’ai pu observer un magnifique bouquetin mâle sortant paisiblement d’un bosquet entourant la falaise pour se rendre dans les pâturages encore imprégnés de rosée. Il m’a permis de réaliser un portrait entremêlant ombres et lumière que j’apprécie beaucoup, et tenais à partager avec vous en ce lieu magique…
Le bouquetin du Creux-du-Van a sa propre histoire, et débute lorsque le Conseil d’Etat neuchâtelois décide de créer une réserve naturelle dans la région allant de Treymont au Creux-du-Van en 1961. Entre 1965 et 1970, sous l’impulsion d’Archibald Quartier, alors chef du service cantonal de la faune, 8 mâles et 6 femelles originaires du Valais ont été introduits dans cette réserve. Le groupe a rapidement prospéré pour compter une trentaine d’individus au début des années 80. Par la suite, leur nombre diminue progressivement et le cheptel se transforme en un groupe vieillissant qui ne se reproduit quasiment plus. Pour tenter d’inverser la tendance, et minimiser les problèmes de consanguinité, 3 jeunes femelles et 2 mâles sont relâchés dans la réserve en 2005, ce qui redonne une certaine vigueur au groupe. Depuis lors, il semble que les bouquetins du Creux-du-Van se renouvellent avec une moyenne de 4 naissances par année. L’équilibre reste cependant fragile, et la survie à long terme des uniques bouquetins de l’arc jurassien dépendra inexorablement de la place que l’Homme choisira de lui accorder…
Texte et image: Fabian Spigariol
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